Les parcs d’entrepreneurs jouent un rôle majeur dans le développement économique urbain. Il en existe de nombreux à Chengdu, chacun avec ses propres caractéristiques, qu’il s’agisse des hautes technologies qui sont à l’image de Chengdu, une ville à la pointe des sciences et technologies, ou des sites qui abritent le patrimoine industriel de la ville, devenus des destinations culturelles et touristiques branchées. On trouve aussi de grands parcs d’exposition dont le patrimoine connaît une nouvelle vie, offrant des services publics de haute qualité, ainsi que de nombreux petits parcs culturels et créatifs charmants.
Derrière une telle abondance se cachent de nombreuses aventures humaines qui suscitent enthousiasme et envie d’exploration, montrant le caractère inclusif et innovant de la ville.
Rendre les musées accessibles à tous
Au cours de ces deux dernières années, la télévision publique chinoise CCTV a évoqué à de nombreuses reprises Gumao, une équipe entrepreneuriale qui se consacre à la vulgarisation scientifique et culturelle. Dans un reportage récemment diffusé, on peut voir son fondateur Tang Shiwei expliquer à des enfants dans un édifice ancien des principes architecturaux et comment la charpente a été construite. « J’espère planter une graine d’idée chez ces enfants », dit-il. Son équipe fabrique aussi des produits culturels et muséaux pour attirer les passionnés et faire de la vulgarisation.
Une fois diplômé, M. Tang est retourné dans sa ville natale et s’est consacré à la recherche académique et à la protection des bâtiments anciens à l’Institut du patrimoine culturel et d’archéologie de Chengdu. C’est là qu’il a pris conscience de l’importance de la vulgarisation. Il cite l’exemple de la rénovation du pavillon Guanyin, un bâtiment de la dynastie Ming à Ya’an. Il avait été endommagé lors d’un tremblement de terre, mais par manque de sensibilisation à la protection du patrimoine, l’intérieur du bâtiment était déjà en ruine quand les réparations ont finalement été entreprises. Si elles avaient été effectuées consciencieusement et en temps opportun dès le début, estime-t-il, même en construisant tout simplement un toit en tôle pour protéger le bâtiment de la pluie, il n’aurait pas fallu dépenser des millions de yuans quelques années plus tard.
« Il faut d’abord comprendre pourquoi nous devons protéger le patrimoine pour que nous puissions vraiment le protéger », explique-t-il. Il considère que la vulgarisation culturelle et historique lui permet de valoriser pleinement ses compétences. C’est pourquoi il a quitté l’institut en 2019 et fondé Gumao, dont l’activité principale consiste à produire des contenus électroniques pour les grands musées. Ces contenus sont bien accueillis car ils se distinguent des commentaires traditionnels, plus directs et humoristiques.
En 2021, Gumao a commencé à se concentrer sur les vidéos courtes. « Ce que nous voulons, c’est faire entrer le musée chez vous. Il faut qu’en visionnant la vidéo, le public désire se rendre au musée pour le visiter en personne. » Aujourd’hui, le compte vidéo de Gumao compte plus de 500 000 fans, et certaines institutions culturelles et touristiques viennent le trouver pour lui confier des projets. Par exemple, en 2023, Gumao a coopéré avec l’Institut provincial d’archéologie du Gansu et réalisé plus d’une vingtaine de vidéos en utilisant les pièces du patrimoine pour faire connaître les réalisations de l’archéologie du Gansu et montrer les fouilles archéologiques. En 2024, avec le succès du jeu Black Myth: Wukong où l’on trouve des édifices anciens, Gumao a été invité par le Bureau provincial de la culture et du tourisme du Shanxi à produire une série de vidéos sur l’architecture ancienne de cette province.
M. Tang se donne pour mission de rendre les musées populaires. Lorsqu’il a créé son entreprise en 2019, il a jeté son dévolu sur le Parc culturel et créatif Shijing Wenchuan du quartier de Shaocheng. C’est un exemple typique de valorisation adaptative à Chengdu. Le site appartenait à l’origine à Sichuan TV et a été transformé en parc culturel et créatif plus tard. Comparé aux immeubles de bureaux haut de gamme, il s’y sent à l’aise, plus libre. « Nous ne pouvons pas nous éloigner des musées, nous devons puiser notre force dans les musées », précise-t-il, car Shaocheng possède un riche patrimoine historique et on y trouve de nombreux musées aux alentours.
M. Tang se réjouit de constater que les musées sont de plus en plus populaires auprès du grand public, notamment avec l’engouement pour le patrimoine culturel et l’archéologie. Il compare Gumao à un marché de la culture et des connaissances ouvert 24/7 pour répondre à cette demande.
La teinturerie Qinghong
Des contenus créatifs populaires
La société de communication culturelle Pofeng Culture est située dans le Parc culturel et créatif de Jinyouli dans la rue Jianshe Nanxin, qui est un petit parc entouré de vieux bâtiments résidentiels et d’un marché aux fruits et légumes animé. Son fondateur et directeur, le blogueur Wang Xiaobei, s’y est installé en 2022 pour son caractère ouvert et accueillant. « C’est comme chez des voisins, explique-t-il, tout le monde peut se rendre visite. » Il y avait une entreprise de publicité au rez-de-chaussée, et de nombreux collègues pouvaient venir s’asseoir et discuter de projets ». Pofeng Culture et plusieurs cafés autour du parc s’entendent comme des voisins et ont rapidement tissé des liens, allant jusqu’à fêter ensemble les anniversaires.
L’équipe gère le compte officiel Illustré Wanshi, qui vise à « explorer l’art et la culture de la vie urbaine ». Ils ont recueilli l’histoire du quartier, les histoires émouvantes des commerces anciens et récents, et les ont complétées par des légendes et une mise en page vivantes. Leur compte officiel est comme une carte vivante d’exploration des magasins et un guide d’achat.
Xiaobei travaillait dans le domaine de la stratégie de marque dans une maison d’édition culturelle à Beijing. Il prend plaisir à lire et écrire pour des comptes officiels et est devenu blogueur littéraire par passion. Il anime Lectures de Xiaobei, son propre compte consacré à la lecture, et encourage chacun à se lancer dans la création en fonction de ses compétences et de ses centres d’intérêt. Par exemple, pour une collègue qui adore les petits pains, il a réalisé une rubrique spéciale sur le compte officiel Illustré Wanshi pour explorer la carte gastronomique des meilleurs petits pains de Chengdu. Pour une collègue qui adore skier, il lui a demandé de raconter son expérience sur les pistes des deux côtés de la frontière pendant ses études en France. Le plus populaire est le Plan des librairies d’occasion de Chengdu, réalisé par Xiaobei lui-même. Dès sa sortie, la version 2022 a été largement saluée.
Chengdu abrite un grand nombre de librairies d’occasion. Même si les librairies en ligne sont nombreuses, le plaisir de visiter les librairies d’occasion reste irremplaçable, souligne-t-il. Il a passé au peigne fin les librairies d’occasion recommandées par les internautes et les médias en ligne et a sélectionné celles que des auteurs plus âgés de Chengdu mentionnent dans leurs livres et leurs articles. Il les a ensuite visitées et envoyé des messages privés à toutes celles qui ont une adresse IP à Chengdu. Enfin, il a recueilli des données sur près d’une centaine de librairies et les a visitées une par une. Il a répertorié les adresses, raconté ses visites, et évoqué ses sélections de livres. Jusqu’à présent, la Carte des librairies d’occasion de Chengdu est mise à jour chaque année et les lecteurs continueront d’interagir avec Xiaobei et de l’informer en ligne sur l’actualité des librairies d’occasion.
Ces produits culturels ont permis à l’entreprise d’accroître son activité. Les articles sur les visites étaient à l’origine le produit de l’enthousiasme en matière d’exploration de la culture locale. Par la suite, une société immobilière, culturelle et touristique a sollicité l’équipe pour concevoir une brochure de marque, exigeant qu’elle soit conçue comme un magazine à la fois chaleureux et riche en contenu. L’article sur le ski s’est également avéré être un avantage lorsque l’équipe était en concurrence pour une promotion culturelle et touristique qui incluait un projet sur le ski, lui permettant d’obtenir le marché. Ces succès ont renforcé la confiance de Xiaobei.
Le parc Eastern Suburb Memory est un site créatif et culturel qui monte à Chengdu. （PHOTOS : HAN JIE）
Une poursuite esthétique réussie
Derrière la vieille rue Anren se trouve une ruelle calme qui abrite la célèbre Académie des Beaux-Arts de Tianfu. Également connue sous le nom de Parc culturel et créatif 1458, elle comprend deux cours adjacentes, les nos 148 et 158. Des ateliers de teinture, de menuiserie et de maroquinerie, mais aussi des restaurants, cafés, brasseries artisanales et snack-bars se sont installés à l’intérieur et à l’extérieur de la cour tant l’endroit est confortable et naturel.
Il est difficile d’imaginer qu’il s’agissait à l’origine d’une fabrique de confiseries abandonnée, avant qu’elle n’abrite un élevage de poulets dont les déjections s’accumulaient sur 10 cm d’épaisseur. En 2017, une équipe a pris possession des lieux et commencé à les remettre en état pour leur redonner vie.
L’Académie des Beaux-Arts de Tianfu est un véritable catalyseur pour les jeunes créateurs, leur offrant un espace pour exprimer leur passion. Par exemple, Xiaoman, la première responsable de la teinturerie Qinghong, est diplômée du département de design de mode de l’Académie des Beaux-Arts de Chine. Elle a beaucoup voyagé pour rendre visite à des artisans. Finalement, elle a décidé d’étudier en profondeur les techniques de teinture végétale et s’est installée à Anren pour créer une teinturerie en 2014. Xiaowu, propriétaire de la menuiserie Wujiang, était auparavant designer et programmeur. Après son arrivée dans cette cour, il est devenu un jeune homme polyvalent qui fabrique des guitares, aide ses amis dans la cour à fabriquer des meubles, distille de l’alcool, et gère une maison d’hôtes.
La teinturerie Qinghong est un pilier dans le parc, fidèle à l’héritage artisanal traditionnel. Les vêtements vendus dans la boutique sont tous fabriqués à partir de tissus naturels en coton, en lin, en soie et en laine, avec des designs simples et élégants. Les clients peuvent découvrir la teinture à la main sur place lors de leur achat. On y utilise des teintures végétales traitées à l’ancienne et on peut s’initier aux méthodes de teinture et de tissage traditionnelles. Qinghong propose aussi des créations sur mesure, notamment des vêtements, des meubles capitonnés et des objets de décoration intérieure.
Après huit années d’existence, l’Académie des Beaux-Arts de Tianfu rayonne d’une atmosphère calme et inspirante. Elle a redonné vie à des lieux empreints d’histoire et dynamisé le voisinage. Des restaurants de fondue chinoise, des boulangeries, des échoppes de dimsum et des salons de thé ont ouvert, créant une atmosphère vivante où se croisent des traditions et des saveurs variées. Fidèle à un concept qui prône l’idée que « la beauté et la créativité sont les principales forces productives », le parc culturel incarne une esthétique légère mais profonde. C’est le lieu idéal pour poursuivre ses rêves dans un cadre enthousiaste et dynamique.
*HUANG WEI est journaliste à Chengdu Culture.
