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Entre rétorsion et diversification

2025-04-01 10:55:00 Source: La Chine au présent Auteur: ZHOU MI*
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Face à l’avalanche de droits de douane de Trump, l’UE doit défendre ses intérêts tout en élargissant ses horizons vers de nouveaux partenaires économiques. 

Déchargement d’un porte-conteneurs au terminal à conteneurs de Barcelone, exploité par APM Terminals, à Barcelone le 13 janvier 2025

Ces barrières commerciales avaient pourtant connu une tendance à la baisse depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Peu après l’investiture de son second mandat, Donald Trump déclenchait un raz-de-marée de tarifs douaniers. Décidément, il porte bien son surnom autoproclamé de « Tariff Man ». Toutefois, ces taxes ne constituent plus une source majeure de recettes fiscales pour la plupart des pays depuis longtemps.

Aujourd’hui, l’UE, à peine sortie d’une période d’inflation élevée et de pénurie énergétique, mais toujours en proie à des crises géopolitiques, voit son allié américain brandir à nouveau la massue tarifaire. Dans ce contexte instable, des questions s’imposent : comment l’UE, respectueuse des règles commerciales multilatérales, doit-elle faire son choix ? Le marché américain est-il réellement incontournable ? Il est peut-être temps pour l’UE, en quête de réduction des risques économiques, de diversifier ses relations commerciales.

L’impact pour l’UE et sa riposte

Le 26 février, le président américain a annoncé, lors d’une réunion de cabinet, son intention d’imposer des droits de douane de 25 % sur tous les produits européens, notamment sur les voitures et les produits alimentaires. Face à cette menace, la Commission européenne a déclaré qu’elle réagirait « fermement et immédiatement » avec les Vingt-sept. Bernd Lange, président de la Commission du commerce international au Parlement européen, a également évoqué la possibilité de restaurer les mesures commerciales punitives à l’égard des États-Unis, suspendues à l’ère Biden dans des efforts de réduction réciproque des droits de douane.

Le 12 mars, la première salve de droits de douane de 25 % voulus par Donald Trump s’est abattue sur l’acier et l’aluminium européen. Immédiatement, l’UE a répliqué en taxant un éventail de produits américains tels que les motos, les jeans, le beurre de cacahuète et le whisky Bourbon. Ces représailles sont non sans rappeler sa stratégie adoptée sous le premier mandat de Trump, lorsque des surtaxes ont été imposées sur l’acier et l’aluminium en vertu de la section 232 de la loi américaine sur le commerce de 1962. L’objectif était clair : frapper les États républicains et les produits traditionnels à forte demande à l’exportation pour affaiblir leur compétitivité sur le marché européen.

Face à Donald Trump, qui signe à tour de bras des ordres exécutifs pour instaurer les surtaxes, l’UE risque de se retrouver sur la sellette, en raison de son complexe mécanisme de décision tarifaire et de la forte dépendance de son économie au commerce extérieur. Selon les Perspectives économiques mondiales publiées par la Banque mondiale en janvier, la zone euro a enregistré en 2022 une croissance de son PIB réel de 3,5 %, dépassant ainsi celle des États-Unis d’un point de pourcentage. Cependant, cette croissance a chuté à 0,4 % en 2023 et 0,7 % en 2024, tandis que celle des États-Unis s’est établie à 2,9 % et 2,8 %. À en croire les prévisions de la Banque mondiale pour 2025, dressées avant même que Trump n’annonce ses nouvelles taxes de 25 %, la croissance de la zone euro devrait frôler 1,0 % contre 2,3 % outre-Atlantique.

Cette guerre tarifaire provoque des inquiétudes en Europe. Henrik Adam, président d’Eurofer, l’association professionnelle des aciéristes, estime que l’UE pourrait perdre jusqu’à 3,7 millions de tonnes d’exportations. Selon la base de données Comtrade des Nations unies, les exportations et les importations de l’UE vers et depuis les États-Unis s’élevaient à 535,85 milliards et 366,15 milliards de dollars en 2023, soit une hausse respective de 41,2 % et 39,2 % par rapport à 2013. Ces taux de croissance excèdent de 21,8 et 18,1 points ceux de ses exportations et importations totales au cours de la même période. Cela témoigne du fait que les États-Unis restent l’un des partenaires commerciaux les plus importants de l’UE.

En 2023, les exportations de l’UE vers les États-Unis représentaient 19,4 % de ses exportations totales, soit 10,8 points de plus que celles vers la Chine ; ses importations en provenance des États-Unis représentaient 13,5 % de ses importations totales, soit 7 points de moins que celles en provenance de Chine, en revanche en hausse de 1,7 point par rapport à l’année précédente. Bien que la balance commerciale de l’UE ait connu des fluctuations notables entre 2013 et 2023, notamment trois déficits entre 2018 et 2023, elle a toujours maintenu un excédent commercial avec les États-Unis, qui est passé de 116,57 milliards de dollars à 169,7 milliards de dollars. Ces dernières années, face aux chocs géopolitiques du conflit russo-ukrainien, l’UE a renforcé ses liens économiques transatlantiques, augmentant ses importations d’énergie américaine et ses exportations vers les États-Unis. Si la hausse des droits de douanes américains est appliquée sur tous les produits européens, l’UE sera exposée à des risques considérables.

Vue du magasin Levi’s de Via del Corso à Rome, le 12 mars 2025. L’UE a annoncé l’imposition des droits de douane sur des produits américains emblématiques comme Harley-Davidson, le whisky Bourbon et les jeans en réponse aux droits de douane du président Trump sur l’acier et l’aluminium.

Renforcer les liens avec le marché chinois

En 2025, le système commercial mondial fait face à des défis majeurs, marqués par la montée de l’unilatéralisme et du protectionnisme. Parallèlement aux mesures de rétorsion, il faut mener des actions proactives en vue de construire un nouveau modèle facilitateur du rééquilibrage des chaînes d’approvisionnement. Malgré l’évolution de la mondialisation économique, le commerce international demeure un moyen clé d’échanger des avantages et conserve un potentiel de croissance conséquent. L’UE occupe une position unique dans les chaînes industrielles et d’approvisionnement mondiales, et son marché intégré a joué un rôle essentiel dans l’optimisation de l’allocation des ressources au cours des dernières décennies. Renforcer les liens avec des marchés comme la Chine et nouer des relations commerciales avec des partenaires respectueux des règles multilatérales permet d’atténuer les risques commerciaux de l’UE.

Avant le premier mandat de Trump, la Chine et l’UE avaient déjà convenu de promouvoir l’ouverture réciproque du marché, y compris en matière d’investissement. Si ces deux grandes économies peuvent établir de telles règles et mécanismes bilatéraux stables, les entreprises auront plus de confiance dans le développement et la coopération à long terme. Dans des secteurs comme les véhicules électriques, l’économie numérique et l’intelligence artificielle, l’UE dispose non seulement de la volonté, mais aussi des conditions favorables pour s’engager.

Ursula von der Leyen parle de « dérisquage » pour l’économie européenne, une nécessité face au principal risque actuel : l’interventionnisme commercial américain et la dépendance excessive de l’UE vis-à-vis des échanges transatlantiques. Cela étant, les États-Unis sont loin d’être le seul partenaire possible, que ce soit dans les secteurs de l’énergie ou de l’automobile. Une coopération sino-européenne renforcée, une circulation facilitée des facteurs de marché et une opposition à l’invocation abusive de la sécurité nationale permettraient de fournir des solutions plus efficaces pour le marché européen. Cela soutiendrait les engagements climatiques de l’UE et le développement durable de son économie verte, tout en permettant à la Chine d’accéder à davantage de produits européens de qualité. Plus important encore, cette coopération renforcerait la stabilité du système commercial mondial et encouragerait les autres pays à s’engager pleinement dans la mondialisation économique, créant de meilleures conditions pour stimuler un développement innovant grâce à des marchés plus vastes et à des consensus plus larges.

 

*ZHOU MI est chercheur à l’Académie chinoise du commerce international et de la coopération économique relevant du ministère du Commerce.

 

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