Accueil>Culture

Faire porter le son du suona plus loin

2023-10-11 13:37:00 Source: La Chine au présent Auteur: LIU CHANG, membre de la rédaction
【Fermer】 【Imprimer】 GrandMoyenPetit
法语词典

  

Liu Wenwen en représentation avec des membres d’un orchestre symphonique chinois  

Le 11 février 2017, au centre de la scène de l’Opéra de Sydney, se tenait Liu Wenwen. Avec l’accompagnement d’un orchestre symphonique occidental, elle jouait du suona, puissant instrument de musique chinois, pour imiter à la perfection des chants d’oiseaux, émerveillant les spectateurs. Première doctorante de suona en Chine, elle a, ces dernières années, propulsé cet instrument « rustique » à maintes reprises sur les scènes internationales. 

Le suona, un instrument à vent à anche double, a été introduit en Chine depuis l’Europe de l’Est et l’Asie de l’Ouest par la Route de la Soie au IIIe siècle. Après environ 2 000 ans de fusion avec la culture chinoise, il a développé un caractère unique et est devenu l’un des instruments folkloriques les plus emblématiques de Chine. Aujourd’hui, grâce à Liu Wenwen, le suona est devenu beaucoup plus populaire. Sur YouTube, son interprétation du morceau Bai Niao Chao Feng (Cent oiseaux rendent hommage au phénix) a attiré de nombreux internautes étrangers, qui ont admiré ce son incroyable et merveilleux et ce dialogue musical entre l’Orient et l’Occident. Selon Mme Liu, le suona n’est pas seulement chinois, mais aussi mondial, et il mérite d’être promu en dehors du pays pour que davantage de personnes puissent apprécier son charme unique.   

« Le suona coule dans mes veines » 

Liu Wenwen est née en 1990 d’une famille de joueurs de suona dans le Shandong. Les membres de sa famille paternelle en jouent depuis sept générations, tandis que les membres de sa famille maternelle s’appliquent à l’art de l’imitation d’animaux avec le suona depuis douze générations. C’est donc dès son plus jeune âge qu’elle a commencé à jouer de cet instrument. 

Il n’est jamais facile de maîtriser un instrument de musique. Qu’il fasse chaud ou froid, se lever tôt pour s’entraîner au suona a toujours été une obligation quotidienne pour la petite fille. Où qu’elle aille, sa mère veillait à ce qu’elle apporte toujours l’instrument, et cherchait toutes les opportunités possibles pour qu’elle se produise sur scène. Comme le suona est surtout utilisé dans les cortèges nuptiaux et funèbres à la campagne, les camarades de classe de Liu Wewen se moquaient de sa « rusticité », et ses voisins se plaignaient du bruit. Sa mère, qui était une excellente héritière de l’instrument, la sermonnait pour chaque erreur. Mais Liu Wenwen a persévéré dans cette voie difficile et s’est fixé l’objectif d’entrer dans un conservatoire de musique. 

Ses efforts n’ont point été vains, alors qu’elle était au collège, elle a été repérée par Liu Ying, un célèbre joueur de suona en Chine, qui a décidé de lui donner des cours gratuits. Depuis lors, tous les week-ends, Liu Wenwen et sa mère prenaient le train pour Shanghai afin de suivre les cours. La distance était longue et les trajets fréquents. Pour économiser de l’argent, elles prenaient toujours les wagons à siège dur qui coûtaient moins cher. 

 « Rétrospectivement, mon enfance a été très difficile, déclare Mme Liu, mais le suona semblait couler dans mes veines, ce qui me donnait la foi et la force de persévérer. Je n’ai jamais voulu abandonner pour exercer une autre profession. » Après plus de dix ans de pratique acharnée, en 2008, elle a finalement été admise au Conservatoire de musique de Shanghai, et le professeur Liu Ying y est officiellement devenu son tuteur. 

  

Liu Wenwen joue du suona.  

La musique traditionnelle voyage 

Après son arrivée à Shanghai, le petit monde de Liu Wenwen s’est immédiatement élargi. Une ville aussi tolérante et cosmopolite offre un vaste espace d’expression à divers types d’art et de culture, et a stimulé la réflexion et l’imagination de Mme Liu en matière de suona. Peu après son intégration au conservatoire, elle a formé un groupe de musique folklorique avec trois bonnes amies qui jouaient de lerhu, du pipa et de la flûte de bambou. Elles ont collaboré avec des groupes de jazz pour composer des morceaux originaux et se produire dans des festivals de musique à l’étranger. « Sur la pelouse, les gens dansaient et se balançaient sur la mélodie. Cette scène m’a vraiment touchée », se souvient Mme Liu, qui ne s’attendait pas à ce que l’ambiance de son concert, souvent solennelle en Chine, puisse être si différente à l’étranger. « Notre musique touchait les spectateurs, alors que leur langage corporel spontané et leurs réactions donnaient une nouvelle dimension à notre musique. » 

Les années suivantes, elle s’est rendue dans plusieurs pays européens dans le cadre des programmes d’échange universitaire pour participer à des recherches et à des représentations. Tout en appréciant les styles musicaux occidentaux modernes, elle a réfléchi à la manière de mieux diffuser le suona. 

En 2015, pendant son master, Mme Liu a rencontré par hasard Tan Dun, un compositeur et chef d’orchestre de renommée internationale. À ce moment-là, M. Tan avait besoin du son de suona pour l’une de ses œuvres, et un ami lui avait recommandé Liu Wenwen. Dès qu’elle s’est mise à jouer, le grand musicien était subjugué par la puissance qui émanait de l’instrument. M. Tan lui a dit : « Et si nous recréions une version internationale de Bai Niao Chao Feng ? » 

Bai Niao Chao Feng est le morceau de suona le plus classique qui décrit la vitalité de la nature et de la vie. Dans la version originale, on entendait des oiseaux et des coqs chanter, des poules pondre et même des enfants pleurer. Bien que le suona ait été particulièrement bien exploité, le morceau restait plat sans aucun moment culminant. Plus tard, Ren Tongxiang, un célèbre joueur de suona, l’a remastérisé en supprimant les cris des poulets et des enfants, et en rajoutant d’autres passages plus rythmés, ce qui l’a rendu à la fois plus vivant et chaleureux. Grâce à un film chinois du même nom datant de 2016, Bai Niao Chao Feng est pour la première fois devenue populaire en Chine et a permis au suona de se faire connaître et aimer du grand public. 

Sur cette base, M. Tan a innové en combinant le suona avec de la musique orchestrale moderne pour en faire un concerto. Deux ans plus tard, la version retravaillée de Bai Niao Chao Feng a été achevée, M. Tan a amené Liu Wenwen sur la scène de l’Opéra de Sydney. Lorsqu’elle a terminé la phrase culminante de 40 secondes d’un seul souffle, un tonnerre d’applaudissements et d’acclamations a éclaté parmi les spectateurs.   

« Innover ne signifie pas abandonner la tradition » 

Par la suite, Mme Liu et M. Tan ont effectué une trentaine de spectacles à travers le monde, mettant ainsi le suona à la portée d’un plus grand nombre d’étrangers. « Les orchestres occidentaux leur sont familiers, et jouer de la musique folklorique chinoise par ce biais est un excellent moyen de diffusion. » Inspirée par cela, Mme Liu a commencé à intégrer davantage de styles dans ses créations musicales pour moderniser le suona. Dans ses représentations, on retrouve du jazz mélodieux et romantique, du rock libre et explosif et de la musique électronique rythmique. 

 « Cependant, innover ne signifie pas abandonner la tradition, il faut d’abord bien pratiquer les compétences de base et saisir l’âme de l’instrument, faute de quoi la soi-disant innovation ne sera qu’incongrue », explique Mme Liu. En 2020, elle a été admise en doctorat. Bien que le programme de doctorat en suona en Chine existe depuis longtemps, personne n’avait jamais réussi à s’y inscrire en raison des exigences extrêmement élevées. L’un des examens d’entrée consiste à jouer du suona pendant 60 minutes, ce qui met à rude épreuve la force physique et la technique. Mme Liu s’est donc entraînée des dizaines d’heures par jour durant deux mois afin de tenir le coup à l’examen. Elle a ainsi réussi et est devenue la première doctorante en suona de Chine. Aujourd’hui encore, elle consacre au moins six heures par jour à la pratique de l’instrument. 

À côté de ses études, Mme Liu donne des cours aux étudiants de licence. De nombreux jeunes étudiants ont des réflexions profondes et des idées originales sur la création musicale, et elle apprécie beaucoup leur passion pour le suona. Mais elle reste stricte et ne permet pas aux étudiants de prendre trop de liberté créative alors que leurs bases ne sont pas encore solides. Souvent, elle les emmène dans des régions reculées pour rendre visite à des artistes locaux et s’inspirer de chants folkloriques touchants. « Il serait regrettable que ces sons ne puissent pas être recueillis et transmis. Créer notre propre style d’aujourd’hui tout en héritant de ces trésors historiques, c’est la mission des jeunes musiciens », conclut Mme Liu. 

Ces dernières années, Liu Wenwen a donné des concerts dans une vingtaine de villes chinoises, en collaboration avec des artistes folkloriques et des groupes musicaux d’autres genres, ainsi que ses étudiants. Son prochain souhait est de faire sa propre tournée mondiale, pour permettre à davantage de personnes de découvrir l’éclectisme du suona 

 

Partager:

Copyright © 1998 - 2016 | 今日中国杂志版权所有

互联网新闻信息服务许可证10120240024 | 京ICP备10041721号-4

互联网新闻信息服务许可证10120240024 | 京ICP备10041721号-4