Accueil>Chassé-Croisé

Une passion de la Chine et du partage

2025-09-29 10:31:00 Source: La Chine au présent Auteur: LIU TING, membre de la rédaction
【Fermer】 【Imprimer】 GrandMoyenPetit
法语词典

Jean Pégouret, ingénieur devenu sinologue, consacre sa vie à faire découvrir une Chine authentique et à renforcer le dialogue interculturel franco-chinois.

Jean Pégouret devant le Palais du Potala à Lhassa (Xizang, 2024).

« Aujourd’hui, fort de mes nombreux voyages en Chine, de mes études, de mes contacts et de mon bagage universitaire, ma principale activité est d’analyser et de commenter l’actualité internationale impliquant la Chine et ses réalisations, ainsi que son évolution impressionnante, pour les faire connaître aux Français à travers des articles et des interviews », déclare Jean Pégouret, sinologue, géopolitologue de l’Eurasie et président de Saphir Eurasia Promotion, dans un entretien accordé à La Chine au présent. Ce Français de 68 ans a su franchir les frontières disciplinaires et culturelles pour devenir un sinologue respecté, un observateur privilégié des mutations chinoises et un acteur engagé du dialogue interculturel.

Jean Pégouret sur le Bund (Shanghai, 2024).

De l’ingénieur au sinologue

Ingénieur diplômé de l’École Supérieure de Physique et Chimie Industrielles de Paris et titulaire d’un Doctorat en chimie, Jean Pégouret est, dès son enfance, fasciné par les langues, les civilisations et les écritures anciennes. Il apprend le bambara, une langue principale du Mali pendant son service militaire, s’initie aux hiéroglyphes égyptiens et à l’arabe et voyage en Égypte. Mais rien ne semblait le prédestiner à la Chine.

En mai 1989, alors chercheur chez Saint-Gobain, il arrive à Hong Kong pour une mission technique sans se douter que ce voyage bouleverserait sa trajectoire professionnelle et personnelle. Il découvre un univers totalement nouveau pour lui : des gratte-ciel vertigineux, des hommes en costume-cravate utilisant des téléphones portables, une innovation encore rare en France. « Je découvrais une société moderne au-delà de tout ce que je connaissais, animée, active, sans repos, offrant des surprises à tous les coins de rue », se souvient-il.

Guidé par le représentant local de Saint-Gobain, un Chinois originaire de Nanjing, il explore les moindres recoins de la ville, fasciné par l’omniprésence des caractères chinois, les rues animées, les marchés emplis de senteurs exotiques – poisson séché, wonton, pharmacopée traditionnelle, encens des temples – et par l’urbanisme singulier de la ville. « Tout était une source d’admiration et de surprise », dit-il encore.

M. Jean Pégouret retournera à Hong Kong pour plusieurs missions avec Saint-Gobain, puis individuellement tous les ans jusqu’en 1997, faisant même le voyage exprès pour assister à la cérémonie de rétrocession. « J’ai toujours été reçu avec chaleur et autant de plaisir. C’est à Hong Kong que j’ai attrapé la “fièvre jaune” pour la Chine dont je n’ai jamais guéri jusqu’à présent », confie-t-il.

Installé en 1994 dans le quartier chinois du 13e arrondissement à Paris, il commence à apprendre le chinois dans une association à deux pas de chez lui. Cette même année, lors d’un voyage à Beijing, une rencontre personnelle scelle définitivement son destin chinois : il a fait la connaissance de Liu Weili, originaire de Shanghai, qui devient son épouse en mars 1995 à Paris et le guide dans ce « merveilleux jardin de Chine » depuis 30 ans.

Désireux de progresser en chinois, il suit deux années de cours intensifs à la Mairie de Paris, puis s’inscrit en 2002 à l’INALCO en cursus de chinois à temps plein. Grâce aux acquis de ses cours de chinois, il intègre directement la deuxième année. En un an, il valide les enseignements prévus sur trois ans : histoire, géographie, pensée chinoise, relations sino-occidentales, et suit les cours en économie de la Chine. Ces bases solides, enrichies de ses séjours en Chine, jettent les fondations de sa carrière de sinologue. Conscient que son nom français n’est pas familier à la prononciation chinoise, il adopte le nom chinois de Bei Wenjiang (贝文江).

Bei Wenjiang (Jean Pégouret) et son « petit frère » le panda BeiBei (Sichuan, 2025).

Observateur des mutations de la Chine

Au cours des trois dernières décennies, Jean Pégouret a sillonné presque toute la Chine : Beijing, Shanghai, l’Anhui, le Hunan, le Jiangsu, le Jiangxi, le Sichuan, le Yunnan, le Shaanxi, le Fujian, le Guangdong, le Liaoning, etc. « Tous ces voyages ont énormément fait progresser ma connaissance et ma compréhension de la Chine dans ce qui la rassemble et dans sa diversité », affirme-t-il.

Ses nombreux séjours au Xinjiang et au Xizang l’ont particulièrement marqué. Selon lui, les représentations des médias occidentaux sont « totalement déformées ». « Cette vision prétend que les populations locales sont opprimées, qu’elles ne peuvent vivre selon leur culture et leur religion et sont soumises à des atteintes contraires à la démocratie et aux droits de l’homme et même que ces régions ne font pas partie de la Chine et donc devraient devenir indépendantes. Mes observations sur place ont confirmé mes études documentaires sur les activités de déstabilisation menées par des services de pays hostiles ayant soutenu des mouvements séparatistes islamistes recourant au terrorisme au Xinjiang ou au retour de la théocratie féodale au Xizang », remarque-t-il.

Selon lui, la meilleure façon d’avoir un aperçu de la réalité est d’aller voir sur place. Il a constaté que la grande majorité des Français qui revenaient d’un séjour en Chine alors qu’ils partaient avec des a priori, rentraient les « yeux pleins de lumière ». « Ils voient que les services publics fonctionnent sans que le poids des impôts soit une préoccupation quotidienne, que les retraités sont jeunes et profitent de faire du tourisme y compris au Xinjiang et au Xizang, se promènent dans des parcs et des rues bien entretenus et joliment décorés. Ils voient des villes actives, la climatisation partout lorsqu’il fait chaud, des métros propres, pas bondés et ponctuels, des voitures confortables et en bon état et réalisent qu’ils ne risquent pas de se faire voler leur portefeuille ou agresser dans la rue… Ils découvrent que la Chine est loin d’être une dictature, que loin de les contraindre, le Parti communiste chinois a pour objectif prioritaire de satisfaire les aspirations naturelles des Chinois. »

Au fil des décennies, le contraste est saisissant. En 2010, il a visité le pavillon chinois de l’Exposition universelle de Shanghai, qui présentait la vie d’une famille chinoise sur quatre générations depuis 1949. « Ce que j’ai vu de la progression du niveau de vie en Chine depuis l’ouverture et la réforme confirme la très nette amélioration du niveau de vie des familles chinoises. J’ai pu déjà le vérifier sur les quatre générations de la famille de mon épouse. »

Le paysage urbain a radicalement changé : la marée de vélos dans les années 1990 a laissé place aux voitures et scooters ; les tours d’habitation de trente étages ont envahi les villes, et des quartiers anciens ont été rasés pour faire place à de nouveaux immeubles ou réhabilités pour conserver leur caractère traditionnel ; les lignes de métro se sont multipliées, et les TGV desservent désormais les grandes villes, même les plus reculées comme Urumqi et Lhassa, avec des gares aux allures futuristes.

La numérisation du quotidien est un autre changement majeur : les téléphones portables se sont généralisés ; les paiements dans les moindres magasins et les transports s’effectuent par des applications mobiles en scannant des QR codes ; les achats en ligne sont omniprésents.

Dans les rues de Maerkang pour la promotion de la littérature chinoise à l’étranger (Sichuan, 2025).

Un acteur du dialogue franco-chinois

Jean Pégouret œuvre aussi au rapprochement entre la France et la Chine. Avec son épouse, il organise des concerts d’artistes chinois à Paris à l’occasion des fêtes du Nouvel An chinois et de la Mi-Automne, et participe à de nombreuses manifestations du Centre culturel de Chine à Paris. En 2013, alors vice-président de l’Association des entreprises du quartier asiatique de Paris 13e (Entreprises 13), il initie le projet de l’« Arche de la Fraternité », la première porte chinoise érigée dans le plus grand Chinatown de Paris sept ans plus tard.

Auteur et contributeur, il participe en 2024 à deux ouvrages collectifs sur le 60e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la France et la Chine, édités par les maisons d’édition La Route de la Soie et Delga. « J’espère que ces actions permettent de rapprocher les deux pays et, surtout, de corriger une vision déformée de la Chine qui est donnée depuis 2008 par la quasi-totalité des médias français », souligne-t-il.

Président de Saphir Eurasia Promotion, une association qu’il fonde en 2010, il défend une vision d’intégration progressive de l’Eurasie, de l’Atlantique au Pacifique, inspirée de l’Organisation de coopération de Shanghai. « Ce modèle se base sur le respect mutuel, sur le rejet de la relation du fort au faible, sur le règlement des différends par le dialogue et non par la confrontation, et sur la recherche de coopérations gagnant-gagnant. »

En 2024, il reçoit le Prix de l’Ambassadeur de Chine, distinction qui, dit-il, l’honore mais lui rappelle aussi son devoir de poursuivre son engagement.

Son parcours illustre les préceptes de Confucius qu’il aime citer : « N’est-il pas doux d’apprendre et de constamment répéter ce que l’on a appris ? N’est-il pas agréable d’avoir un ami qui vient de loin ? » Et d’ajouter que la joie d’apprendre, de transmettre et le bonheur des rencontres l’animent depuis toujours. « Je souhaite que, surtout dans notre époque où le monde se cherche, ces paroles de Confucius au-delà des distances et des différences soient largement partagées. »

 

Partager:

Copyright © 1998 - 2016 | 今日中国杂志版权所有

互联网新闻信息服务许可证10120240024 | 京ICP备10041721号-4

互联网新闻信息服务许可证10120240024 | 京ICP备10041721号-4